Date : 2023
Format et techniques : Acrylique sur toile – Polyptique – 3m de diamètre
Projet mis en place par Guillaume Lepoix dans le cadre du P.A.G 2023 du sud Haute-Marne.
L’idée de ce projet est née d’une réflexion sur le concept de «cadre» dans le domaine de la peinture, ainsi que dans celui de l’image en général. Nous nous sommes interrogés sur le sens de la forme du cadre :
Pourquoi choisir un carré ou un rectangle ? Pourquoi des angles droits ? Pourquoi devrait-il toujours y avoir un hors-champ ? Comment trouver une forme d’image qui s’affranchit de ces contraintes ?
Ces réflexions m’ont amené à explorer les principes mis en place dans les technologies de réalité virtuelle. Ce sont ces dispositifs, il me semble, qui se rapprochent le plus de la vision humaine et élimine la notion de hors-champ imposée par l’écran dont les bords sont visibles. Ici, le spectateur est pleinement immergé dans l’image.
Alors, comment utiliser ce système dans le domaine de la peinture sur châssis ?
C’est ainsi que m’est venue l’idée de modifier la forme rectangulaire classique du châssis pour lui donner la forme d’un quartier de sphère. En multipliant ces quartiers, j’ai pu envisager la conception d’un châssis sphérique, formé de 12 tranches se refermant comme un cocon. Une fois cette structure réalisée, j’ai pu concevoir la possibilité de peindre « sur le motif » mais à 360° .
De la même manière que cette création fragmentée, j’avais besoin d’interroger aussi la duplicité dans la notion » d’auteur ». Ici, c’est bien l’artiste-peintre lui-même qui se trouve démultiplié. Car ce n’est pas une seule personne qui va générer l’œuvre, mais plutôt des dizaines de collégiens, de lycéens, de professeurs et moi-même. En effet, les châssis ont été fabriqués par les lycéens en bac pro technicien bois du lycée Charles de Gaulle à Chaumont. Une fois les supports prêts, ils ont été livrés au Collège Amiral Denis Decrès à Châteauvillain. C’est à l’orée des bois de cette commune que nous avons trouvé, ensemble, le motif qui allait être peint.
Pendant une journée entière, les dizaines de jeunes peintres et moi-même avons recouvert les toiles au motif de l’environnement qui nous entourait. Chaque quartier de la sphère a été imprégné des impressions picturales des peintres. Cependant, leurs pinceaux voguaient de châssis en châssis, sans se concentrer sur un seul, mais plutôt en partageant l’espace commun de l’ensemble des toiles. Chacun y a apporté sa touche, passant d’un quartier à l’autre, de manière à ce qu’il soit impossible de reconnaître le « style » de quelqu’un en particulier. Le résultat final est donc celui d’une « équipe artistique » qui a dû échanger, dialoguer et se coordonner pour donner vie à la toile.
Une fois la sphère entièrement peinte, celle-ci a été installée dans les deux établissements, dans le CDI du collège et dans la grande salle du lycée, afin d’y continuer sa vie.
De la même manière que durant sa mise en œuvre, cette création ne dispose pas d’un seul système de présentation : elle peut être exposée en alignement de châssis, en demi-sphères, en spirale, ou bien basculée au sol ou accrochée au mur, voir même totalement refermée sur elle-même. Chaque installation varie le curseur des perceptions du public entre une installation sculpturale peinte et un polyptyque refermant une représentation mystérieusement enveloppée sur elle-même.
À la manière d’une fleur qui éclot, évolue et se fane, cette installation picturale est une tentative de saisir, en peinture, les mutations naturelles de l’environnement qui nous contient, où, en somme, rien n’est cadré, rien n’est figé où tout vis et où tout est plein d’âme.
Vidéo de présentation de la conception du projet « Carpelle » :
Réalisé en partenariat avec le Département de la Haute-Marne