Exposition – SAUVAGE MANIÈRE

« Sauvage Manière » est le résultat d’une envie commune aux artistes Thomas Daveluy, Guillaume Lepoix et Anne-Marie Bressollier, responsable de la Galerie du Faouëdic jusqu’en 2023, d’ouvrir la Galerie du Faouëdic aux nouveaux médias. Le passage de relais à Delphine Balligand en 2023 a prolongé et renforcé la volonté de faire de ce lieu un espace d’expérimentations, où de nombreuses formes plastiques peuvent s’exprimer et proposer une vision originale et singulière. Les réflexions artistiques de Thomas Daveluy et Guillaume Lepoix s’axent autour du paysage et de sa représentation à l’heure du numérique. Les enjeux et les problématiques qui nourrissent leurs travaux respectifs n’ont eu de cesse de se croiser, donnant lieu à de nombreuses collaborations artistiques ces dernières années.

 

HISTOIRE DU PROJET

Interroger l’Image à l’ère du numérique

une époque où les images sont influencées, manipulées ou générées par le numérique, les deux artistes entament une réflexion sur leur nature et leurs liens avec la peinture, la photographie mais aussi des disciplines plus récentes dans l’Histoire de l’Art telles que le cinéma ou le jeu vidéo. « Sauvage Manière » présente un panel, non exhaustif, des possibilités créatrices offertes par ces nouvelles technologies (photogrammétrie, Intelligence Artificielle, retouche photo, filtres, jeu vidéo).

 

Expérimentation et rêverie autour du paysage

Le titre « Sauvage manière » reflète un désir de se frotter autant aux éléments naturels qu’aux outils techniques et numériques qui permettent de les représenter. Il est aussi une référence aux influences picturales qui ont marqué les deux artistes (allant des peintures rupestres jusqu’à David Hockney) tout en assumant le côté expérimental et accidentel des résultats de leurs productions. L’exposition rassemble cinq productions, individuelles ou collaboratives des deux artistes, présentées, adaptées et créées spécifiquement pour la Galerie du Faouëdic. Elles traitent du paysage dans une approche onirique et expérimentale, sans oublier les paradoxes de notre époque où le numérique et son impact écologique se retrouvent au cœur des enjeux environnementaux actuels.
Guillaume et Thomas se sont rencontrés à l’École européenne supérieure d’art de Bretagne – site de Lorient en 2010. Partageant une vision commune et complémentaire sur les nouvelles technologies et leur manière de faire sens dans la création, ils collaborent régulièrement au travers de résidences ou d’expositions en France ou à l’étranger. Leur précédente expérience collective s’est tenue en 2022 à La Cohue – musée des Beaux-Arts de Vannes.

 


 

« Pin des Landes »

Installation – Composition numérique et impression sur adhésifs
Guillaume Lepoix, Thomas Daveluy – 2023-2024
Première salle du rez-de-chaussée

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, le territoire des Landes était un espace semi-désertique qui s’étendait à perte de vue. Sous Napoléon III débute une plantation massive de pins sylvestres. La perspective s’inverse : le paysage, jusque-là horizontal, devient foncièrement vertical. Cette région est alors totalement bouleversée écologiquement et culturellement. La tradition agropastorale a laissé place à la culture sylvicole intensive. L’installation « Pin des Landes » vise à interroger la manière dont la plantation d’un arbre peut transformer un espace. À la manière d’une explosion spontanée ou d’un envahissement par croissance lente, les murs et reliefs de la galerie sont recouverts d’une photographie panoramique du territoire landais de nos jours. Ces images se retrouvent déformées par les outils numériques et les contraintes du lieu : la texture s’étire, le feuillage se mélange, les pixels se révèlent et des bugs de synchronisation entre les photos se dévoilent.

Cette installation est aussi un hommage au travail photographique de l’anthropologue Félix Arnaudin (1844-1921) dont le travail interrogeait déjà ces problématiques et qui a consacré sa vie à photographier l’ancien territoire désertique des Landes au moment où les pins commençaient à être plantés en masse.

À la manière de Félix Arnaudin, les artistes ont arpenté ce secteur à la recherche des rares espaces horizontaux qui apparaissent de manière temporaire juste après la coupe rase d’une parcelle. Après une dizaine de jours, combinant marches et photographies, les artistes ont sélectionné un fragment d’espace qu’ils ont photographié sous toutes ses coutures. Les images ainsi obtenues ont été transposées et appliquées par projection à même les murs de la galerie, provoquant une intrication d’espaces discordants. Seul le pilier central s’ajuste parfaitement au tronc de l’arbre, faisant office de point de convergence. Ainsi, plus on s’en éloigne, plus l’image perd en définition, glissant au fur et à mesure du photoréalisme vers un rendu vaporeux tendant à une forme d’abstraction.

 

 

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« Sauvage Manière »

Impression jet d’encre – 120 x 120cm
Thomas Daveluy, Guillaume Lepoix – 2023
Affiche et oeuvre exposée en mezzanine, au 1er étage

Le visuel de l’affiche, œuvre la plus récente de ce corpus, est le résultat d’une double envie :
– produire une image qui soit la somme de toutes les créations présentées
dans l’exposition,
– faire de cette addition une nouvelle œuvre et une ouverture vers un ailleurs.
Les artistes se sont alors tournés vers des outils d’Intelligence Artificielle. Ceux-ci permettent en effet de proposer diverses images à un algorithme qui les combine et les réinterprète, selon des consignes textuelles précises (les prompts). Il leur aura fallu de nombreuses tentatives avant d’arriver à un résultat convaincant : l’IA n’apparaissant pas tant comme une technologie « magique » et autonome, mais bien comme un outil à manipuler et ajuster. Les artistes ont ainsi été les premiers spectateurs du résultat de leur travail. Pour la première fois, ils ont suivi un chemin de traverse : créer une image grâce à du texte. A l’issue du processus, ils ont découvert une production qui, en chaque détail, évoque de manière fidèle et subtile chacune des œuvres originales, tout en dévoilant une esthétique totalement nouvelle. Ce paysage onirique et luxuriant, à cheval entre la peinture et le jeu vidéo, interroge les nouveaux rapports à l’image à l’heure de l’intelligence artificielle.

 

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« Terrarium »

⤿ https://guillaumelepoix.fr/index.php/portfolio/items/terrarium/

Installation vidéo – Thomas Daveluy, Guillaume Lepoix – 2018-2023
Troisième salle (grande salle) du rez-de-chaussée

Cette installation propose une déambulation au cœur d’une forêt numérique issue d’une composition de photogrammétries* (scan 3D ou photographies 3D). Ce paysage figé se découvre lentement par le biais d’un mouvement de caméra uniforme et mécanique. Le voyage au sein de cet espace luxuriant forme une boucle parfaite, si bien qu’il n’existe ni début ni fin. Cette marche incessante peut s’apparenter à celle d’un promeneur perdu sous le couvert forestier. Comme un tableau inachevé, le spectateur découvre des espaces photoréalistes côtoyant des esquisses maladroites, pixelisées, aux couleurs baveuses, résultant d’interprétations erratiques des outils utilisés. Les visiteurs se retrouvent plongés au cœur de cette forêt artificielle, elle-même entrant en dialogue avec l’architecture du lieu. Elle réactive la présence de la nature dans cet espace clos et urbain. Pourtant, à bien y regarder, un certain trouble émane de ce paysage : la présence animale et les murmures du vent émergent seulement par le biais du son, témoin ténu d’une vie qui semble pourtant bien réelle. Ces échos viennent contredire l’aspect pétrifié de cette forêt, déclenchant ainsi un sentiment d’inquiétante étrangeté. Balançant entre l’hyperréalisme et l’abstraction pure, « Terrarium » est un territoire de contemplation mais aussi une interrogation sur la représentation et l’imitation du réel au travers des outils du numérique.

 

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« ZeroDimension »

⤿ https://portfolio.thomas-daveluy.fr/post/art-numerique/zerodimension

Installation numérique interactive – Thomas Daveluy – 2016-2023
Musique composée par David Bideau.

Cette installation propose de voyager à travers un univers buggé, où la perception de l’espace est inversée : les objets proches sont masqués par ceux situés au loin par un jeu de perspective renversée. Arrière-plan et premier plan sont ainsi intervertis tandis que les repères habituels (haut, bas, horizon, distances) deviennent flous.
Au milieu de cet amas de pixels aux couleurs explosives, on distingue, au fil de l’exploration, une forme qui semble se dessiner : branches, ramifications, grotte, racines, des éléments fugaces qui peuvent évoquer un paysage naturel corrompu. Cet îlot quasi-informe est le seul élément visible au sein de cet univers. Le spectateur prend alors la place d’un explorateur, à la recherche d’une compréhension de ce monde. Il est impossible de réellement s’éloigner de cet espace replié sur lui-même : quelle que soit la direction choisie, même en avançant en ligne droite, on revient toujours au centre de ce microcosme. Lorsque l’on quitte le centre pour avancer dans l’inconnu, les parties de l’écran devenues vides sont remplacées par une surimpression issue des images précédentes, dessinant une trame persistante.
Le numérique offre ici la possibilité de voyager et d’explorer un monde radicalement différent du nôtre, un espace impossible à la géométrie non euclidienne.

 

 

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« Forêt primaire »

⤿ https://guillaumelepoix.fr/index.php/portfolio/items/foret-primaire/

Installation numérique interactive – Guillaume Lepoix – 2017-2022
Deuxième salle du rez-de-chaussée.

d’explorer une forêt virtuelle réalisée à partir de dessins d’enfants. Guillaume Lepoix a ainsi collecté, pendant 5 ans, des motifs de végétaux créés par plus de 600 écoliers, collégiens et lycéens, dans toute la France. Chaque arbre reflète ainsi la personnalité de son créateur, tout en se fondant dans l’ensemble complexe et protéiforme qu’est la forêt elle-même, composée par l’artiste. Avec près de 700 végétaux différents, cette forêt virtuelle bénéficie d’une biodiversité nettement supérieure à nos forêts européennes, interrogeant ainsi, notre rapport à la Nature et sa diversité à l’heure de l’anthropocène. Le spectateur/joueur est invité à explorer cette étrange jungle et à admirer les différents dessins réalisés. L’œuvre a l’allure d’un jeu vidéo sans vraiment en être un, du moins pas un jeu classique. Il n’y a ici aucun score à atteindre, aucun ennemi à abattre, ni énigme à résoudre et aucun but réellement explicité sinon celui de la libre déambulation, de l’exploration et de la contemplation.

 

 


LES RENDEZ-VOUS AUTOUR DE L’EXPOSITION

Visites commentées :

> Samedi 20 janvier 2024 à 14h30,
par les artistes
> Mercredi 28 mars 2024 à 12h30,
par un médiateur ou une médiatrice de la Galerie
> Dimanche 14 avril 2024 à 15h,
par Thomas Daveluy

Conférence : L’Image et l’Art à l’aube de l’IA :

> Mardi 12 mars 2024 à 18h
La réalité virtuelle et l’arrivée récente de l’Intelligence Artificielle ont provoqué une profonde remise en cause du crédit accordé à l’Image. Pourtant ces questionnements ne sont pas neufs et ont toujours animé l’Art et la philosophie au travers des siècles.Thomas Daveluy et Guillaume Lepoix mettront en lumière la manière dont ces technologies peuvent enrichir une pratique artistique, sans omettre les nombreuses zones d’ombres qu’elles contiennent.

 

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